Quand l’herbe est plus verte ailleurs – Les alternatives possibles à la prohibition du cannabis : modèles et expériences

En Belgique, ces derniers temps, le débat sur la « légalisation » du cannabis s’invite davantage qu’à l’accoutumée dans les médias, lors des campagnes électorales et à travers les prises de position du secteur professionnel concerné. Si nous avons d’emblée employé des guillemets, c’est parce qu’il y a beaucoup de confusion dans les termes utilisés, et donc dans les perspectives envisagées. Ces différentes perspectives remettent toutes en cause la prohibition absolue et la répression de l’usage et de la détention du cannabis. Mais elles n’ont pas toutes les mêmes implications ni les mêmes conséquences. Surtout, elles n’ont pas toutes la même cohérence. Le terme « légalisation » est inapproprié pour la plupart d’entre elles.

Il est donc important de clarifier et de nuancer le débat. Cette étude propose d’expliquer clairement les différents concepts visant à remettre en question la prohibition ou à limiter ses effets contre-productifs : tolérance, dépénalisation, décriminalisation, légalisation, libéralisation, régulation. Elle illustrera ensuite ces notions par des expériences ou des réformes concrètes menées dans d’autres pays. La plupart ne s’appliquent qu’au cannabis, certaines incluent d’autres produits. Une tentative d’évaluation de ces différentes politiques permettra de souligner les avantages, les inconvénients, les limites et les effets indésirables de chaque modèle.

Chacune des voies pour dessiner une politique plus juste et plus efficace en matière de drogues peut correspondre à un projet de société plus ou moins progressiste ou volontariste. Il peut s’agir d’aménager la politique actuelle sans entreprendre une réforme profonde du cadre légal. Mais il peut s’agir aussi d’aller de l’avant en révolutionnant la manière d’appréhender, de penser les drogues, leurs usages et les personnes consommatrices. Liaison Antiprohibitionniste est partisane d’un changement de politique impliquant nécessairement la régulation du marché. Toutefois, consciente du défi et des enjeux liés à une perspective de changement, notre association admet qu’il faudra peut-être passer par une ou par plusieurs étapes transitoires avant de voir éclore une politique des drogues différente, axée sur la santé et les droits humains et non sur des impératifs moraux sans aucune base scientifique et, par ailleurs, totalement contre-productifs.

C’est à partir de ces critères – santé, droits humains, cohérence – que les différentes politiques seront évaluées. La lectrice ou le lecteur pourra se faire son propre avis. Cette étude s’adresse autant aux responsables politiques et intervenant·e·s du secteur assuétudes qu’à la population – qu’elle soit concernée ou non par l’usage de drogues – car sa conscience citoyenne ne peut demeurer indifférente aux choix de société et aux coûts (sanitaires, financiers, humains, sécuritaires…) impliqués par la prohibition des drogues.